Convergence

On dit que la suite $ (u_n)$ converge vers un réel $ l$ (sa limite) si tout intervalle ouvert contenant $ l$, contient aussi tous les $ u_n$ pour $ n$ assez grand.

Définition 5   Soit $ (u_n)_{n\in\mathbb{N}}$ une suite de réels et $ l$ un réel. On dit que la suite $ (u_n)$ converge vers $ l$, (ou tend vers $ l$, ou a pour limite $ l$) si :

$\displaystyle \forall \varepsilon >0 ,\;\exists n_0\in\mathbb{N} ,\;\forall n\geqslant n_0\;,\quad
\vert u_n-l\vert\leqslant \varepsilon \;.
$

On notera :

$\displaystyle \lim_{n\rightarrow\infty} u_n = l$   ou bien$\displaystyle \quad
u_n \xrightarrow[n\rightarrow +\infty]{} l\;.
$

Autrement dit, tout intervalle ouvert centré en $ l$ contient tous les termes de la suite à partir d'un certain rang. Observons que le rang $ n_0$ à partir duquel tous les termes de la suite restent dans l'intervalle $ [l-\varepsilon ,l+\varepsilon ]$, dépend de $ \varepsilon $. La figure 1 représente les $ 50$ premiers termes de la suite $ (u_n)=(1+\sin(n)/n)_{n\in\mathbb{N}^*}$. La limite est $ l=1$. On a :

$\displaystyle \vert u_n-l\vert = \left\vert\frac{\sin(n)}{n}\right\vert\leqslant \frac{1}{n}\;.
$

Fixons $ \varepsilon >0$ (sur la figure $ \varepsilon =0.05$). Posons $ n_0=\lfloor 1/\varepsilon \rfloor+1$ ($ n_0=21$ pour $ \varepsilon =0.05$). Pour tout $ n\geqslant n_0$, $ 1/n<\varepsilon $, donc $ \vert u_n-l\vert<\varepsilon $. Sur la figure 1, on constate en fait que $ u_n\in [0.95,1.05]$ pour $ n\geqslant 18$.
Figure: Convergence de la suite $ 1+\sin(n)/n$.
\includegraphics[width=10cm]{limite}
On étend la notion de convergence aux limites infinies de la façon suivante.

Définition 6   Soit $ (u_n)$ une suite de réels.
  1. On dit que $ (u_n)$ tend vers $ +\infty$ si

    $\displaystyle \forall A\in\mathbb{R} ,\;\exists n_0\in\mathbb{N} ,\;\forall n\geqslant n_0\;,\quad
u_n\geqslant A\;.
$

  2. On dit que $ (u_n)$ tend vers $ -\infty$ si

    $\displaystyle \forall A\in\mathbb{R} ,\;\exists n_0\in\mathbb{N} ,\;\forall n\geqslant n_0\;,\quad
u_n\leqslant A\;.
$

Il est commode de pouvoir dire qu'une suite «tend vers l'infini», mais cela induit une certaine ambiguïté sur la notion de convergence.

De même qu'il faut voir $ \varepsilon $ comme un «petit» réel (proche de 0), dans la définition 6 il faut comprendre $ A$ comme grand (proche de l'infini). Une suite tend vers $ +\infty$ si ses termes restent au-dessus de n'importe quelle quantité, à partir d'un certain rang. Voici quelques exemples classiques.

$ \bullet$
Suites arithmétiques : $ (u_n)=(u_0+an)$
  1. Si $ a>0$, $ (u_n)$ tend vers $ +\infty$.
  2. Si $ a=0$, $ (u_n)$ est constante (tend vers $ u_0$).
  3. Si $ a<0$, $ (u_n)$ tend vers $ -\infty$.
$ \bullet$
Suites géométriques : $ (u_n)=(u_0 r^n)$
  1. Si $ u_0=0$, $ (u_n)$ est constante (tend vers 0).
  2. Si $ r\leqslant -1$, et $ u_0\neq 0$, $ (u_n)$ ne converge pas.
  3. Si $ -1<r<1$, $ (u_n)$ tend vers 0.
  4. Si $ r=1$, $ (u_n)$ est constante (tend vers $ u_0$).
  5. Si $ r>1$ et $ u_0>0$, $ (u_n)$ tend vers $ +\infty$.
  6. Si $ r>1$ et $ u_0<0$, $ (u_n)$ tend vers $ -\infty$.
$ \bullet$
Suites de Riemann : $ (u_n)=(n^{\alpha})$
  1. Si $ \alpha>0$, $ (u_n)$ tend vers $ +\infty$.
  2. Si $ \alpha=0$, $ (u_n)$ est constante (tend vers $ 1$).
  3. Si $ \alpha<0$, $ (u_n)$ tend vers 0.
Pour bien comprendre la notion de convergence, nous allons en étudier quelques conséquences faciles, rassemblées dans la proposition suivante.

Proposition 1   Soit $ (u_n)$ une suite de réels :
  1. si $ (u_n)$ converge, alors sa limite est unique ;
  2. si $ (u_n)$ converge vers une limite finie, alors $ (u_n)$ est bornée ;
  3. si pour tout $ n$, $ u_n\in\mathbb{N}$ et si $ (u_n)$ converge vers une limite finie, alors $ (u_n)$ est constante à partir d'un certain rang ;
  4. si $ (u_n)$ converge vers $ l$, alors toute suite extraite de $ (u_n)$ converge vers $ l$ ;
  5. si les deux suites extraites $ (u_{2k})_{k\in\mathbb{N}}$ et $ (u_{2k+1})_{k\in\mathbb{N}}$ convergent vers la même limite $ l$ (finie ou infinie), alors $ (u_n)_{n\in\mathbb{N}}$ converge vers $ l$.

Démonstration : Les démonstrations des 5 points se ressemblent.
  1. Supposons que $ (u_n)$ vérifie la définition 5 pour deux réels $ l$ et $ l'$ distincts. Posons $ \varepsilon =\vert l-l'\vert/3$. Alors les intervalles $ [l-\varepsilon ,l+\varepsilon ]$ et $ [l'-\varepsilon ,l'+\varepsilon ]$ sont disjoints. À partir d'un certain rang, les $ u_n$ devraient appartenir aux deux à la fois : c'est impossible.
  2. Fixons $ \varepsilon >0$, et $ n_0$ tel que $ u_n$ reste dans l'intervalle $ [l-\varepsilon ,l+\varepsilon ]$ pour tout $ n\geqslant n_0$. Alors :

    $\displaystyle \forall n\in\mathbb{N}\;\quad u_n\leqslant \max\{u_0,u_1,\ldots,u_{n_0-1},l+\varepsilon \}\;,
$

    et

    $\displaystyle \forall n\in\mathbb{N}\;\quad u_n\geqslant \min\{u_0,u_1,\ldots,u_{n_0-1},l-\varepsilon \}\;.
$

  3. Soit $ l$ la limite. Si $ l$ n'était pas un entier, pour $ \varepsilon $ suffisamment petit, l'intervalle $ [l-\varepsilon ,l+\varepsilon ]$ ne contiendrait aucun entier, donc aucun des $ u_n$. Donc $ l$ doit être un entier. Posons $ \varepsilon =1/2$. L'intervalle $ [l-\varepsilon ,l+\varepsilon ]$ ne contient qu'un seul entier, $ l$. Comme à partir d'un certain rang tous les $ u_n$ sont dans cet intervalle, et qu'ils sont tous entiers, ils sont tous égaux à $ l$.
  4. Soit $ (u_{\varphi(k)})_{k\in\mathbb{N}}$ une suite extraite de $ (u_n)_{n\in\mathbb{N}}$. Comme $ \varphi$ est strictement croissante, pour tout $ n_0$ il existe $ k_0$ tel que $ \varphi(k)\geqslant n_0$ pour tout $ k\geqslant k_0$. Si tous les $ (u_n)$ sont dans l'intervalle $ [l-\varepsilon ,l+\varepsilon ]$ à partir du rang $ n_0$, tous les $ u_{\varphi(k)}$ sont dans le même intervalle à partir du rang $ k_0$.
  5. Fixons $ \varepsilon >0$. Soit $ k_0$ tel que $ u_{2k}$ reste dans l'intervalle $ [l-\varepsilon ,l+\varepsilon ]$ pour tout $ k\geqslant k_0$. Soit $ k'_0$ tel que $ u_{2k+1}$ reste dans l'intervalle $ [l-\varepsilon ,l+\varepsilon ]$ pour tout $ k\geqslant k_0$. Alors pour tout $ n\geqslant \max\{2k_0,2k'_0+1\}$, $ u_n\in [l-\varepsilon ,l+\varepsilon ]$. La démonstration pour une limite infinie est analogue.
$ \square$


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