Ensembles

Un ensemble peut être vu comme une collection d'objets mathématiques, appelés éléments, comme l'ensemble $ \mathbb{N}$ des entiers naturels. Contentez-vous pour l'instant de l'idée intuitive d'un paquet d'éléments possédant une propriété commune, sur lequel on a mis une étiquette rappelant cette propriété. Un ensemble n'est bien défini que si on peut dire sans ambiguïté si un élément appartient ou non à l'ensemble. Les sommets des Alpes ne forment pas un ensemble (comment décider qu'un endroit particulier est un sommet ?). Par contre l'ensemble des sommets cotés sur une carte donnée est bien défini. Deux ensembles sont égaux si et seulement si ils contiennent les mêmes éléments.

Le fait qu'un élément $ x$ appartienne à un ensemble $ A$ se note $ x\in A$, et son contraire $ x\notin A$$ x$ n'appartient pas à $ A$»). Par exemple $ 2\in \mathbb{N}$ (2 appartient à $ \mathbb{N}$) et $ \sqrt{2}\notin\mathbb{N}$ (racine de 2 n'appartient pas à $ \mathbb{N}$). Certains ensembles souvent utilisés ont une notation propre, comme l'ensemble $ \mathbb{N}$ des entiers naturels, l'ensemble $ \mathbb{R}$ des nombres réels, l'ensemble $ \mathbb{C}$ des nombres complexes. Pour les autres, on utilise une définition, que l'on écrit entre accolades pour dire qu'il s'agit de l'ensemble des éléments vérifiant cette définition. On peut écrire un ensemble en extension, en donnant la liste de ses éléments. Voici deux définitions de l'ensemble des entiers naturels strictement inférieurs à 5.

$\displaystyle \{ n\in\mathbb{N}\;;\quad n<5 \}=\{ 0,1,2,3,4 \}\;.
$

Cet énoncé se lit «ensemble des $ n$ appartenant à $ \mathbb{N}$ tels que $ n<5$»  ou «ensemble des entiers strictement inférieurs à $ 5$». Voici deux définitions de l'ensemble des diviseurs de 12.

$\displaystyle \{ n\in\mathbb{N}\;;\quad n \vert 12 \} = \{ 1,2,3,4,6,12 \}\;.
$

On peut aussi définir des ensembles en extension par une liste infinie. Le plus souvent, celle-ci se déduit de $ \mathbb{N}$. Par exemple l'ensemble des entiers supérieurs ou égaux à 5 :

$\displaystyle \{ n\in\mathbb{N}\;;\quad n\geqslant 5 \}=\{ n+5\;;\quad\;n\in\mathbb{N} \}\;,
$

et l'ensemble des entiers pairs :

$\displaystyle \{ n\in\mathbb{N}\;;\quad 2 \vert n \}=\{ 2n\;;\quad n\in\mathbb{N} \}\;,
$

Les ensembles que nous définirons seront des sous-ensembles ou parties d'un ensemble plus grand (comme l'ensemble des entiers $ \mathbb{N}$ dans les exemples précédents).

Définition 1   On dit qu'un ensemble $ A$ est un sous-ensemble ou une partie d'un ensemble $ E$ si tout élément de $ A$ est aussi élément de $ E$.

Si $ A$ et $ E$ sont deux ensembles, on note $ E\setminus A$ l'ensemble formé des éléments de $ E$ qui ne sont pas dans $ A$.

$\displaystyle E\setminus A=\{ x\in E ;\; x\not\in A \}\;.
$

Lorsque $ A$ est un sous-ensemble de $ E$, on dit que $ E\setminus A$ est le complémentaire de $ A$ dans $ E$. On le note aussi $ ^c\!A$ lorqu'il n'y a pas d'ambiguïté.

Si $ E$ est l'ensemble de référence (l'ensemble des entiers dans nos exemples), l'ensemble des parties de $ E$ se note $ {\cal P}(E)$. Il contient toujours $ E$ lui-même, ainsi que l'ensemble vide, noté $ \emptyset$. Si $ A$ est un sous-ensemble (une partie) de $ E$, on dit aussi que $ A$ est inclus dans $ E$, et on note $ A\subset E$. On note aussi $ E\supset A$ pour «$ E$ contient $ A$». Voici l'écriture en extension de $ {\cal P}(\{0,1,2\})$, qui est l'ensemble des parties de l'ensemble à trois éléments $ \{0,1,2\}$.

$\displaystyle {\cal P}(\{0,1,2\}) = \Big\{  \emptyset, \{0\},\{1\},\{2\},
\{0,1\},\{0,2\},\{1,2\},\{0,1,2\} \Big\}\;.
$

Un ensemble qui ne contient qu'un seul élément, comme $ \{0\}$, est un singleton. L'ensemble $ {\cal P}(\{0,1,2\})$ contient 8 éléments, dont chacun est lui-même un ensemble. Il est fréquent (et souvent utile) de passer d'un ensemble $ A$ à l'assertion $ x\in \!A$ (vraie ou fausse). Les connecteurs logiques entre assertions («non», «et», «ou») se traduisent par des opérations ensemblistes : complémentaire, intersection, réunion. Nous utiliserons cette correspondance comme définition des opérations ensemblistes.
ensembles assertions
$ A,B$ $ (x\in A), (x\in B)$
complémentaire négation («non»)
$ {^c\!A}$ $ x\in{^c\!A}\Longleftrightarrow\neg(x\in A)\Longleftrightarrow x\notin A$
intersection («inter») conjonction («et»)
$ A\cap B$ $ (x\in A\cap B)\Longleftrightarrow \Big((x\in A)\wedge
(x\in B)\Big)$
réunion («union») disjonction («ou»)
$ A\cup B$ $ (x\in A\cup B)\Longleftrightarrow \Big((x\in A)\vee
(x\in B)\Big)$
Au travers de ce dictionnaire l'implication

$\displaystyle (x\in A)\Longrightarrow(x\in B)$, soit $\displaystyle (\neg(x\in A))\vee(x\in B)\;,
$

devient $ x\in ({^c\!A}\cup B)$. Elle est toujours vraie si et seulement si le complémentaire de $ ({^c\!A}\cup B)$, est vide, c'est-à-dire si $ A$ est inclus dans $ B$. Les propriétés $ (x\in A)$ et $ (x\in B)$ sont équivalentes si les deux inclusions $ A\subset B$ et $ B\subset A$ sont vraies, c'est-à-dire si les deux ensembles contiennent les mêmes éléments. On dit qu'ils sont égaux, et on note simplement $ A=B$. Pour démontrer que deux ensembles sont égaux, on doit montrer que chacun est inclus dans l'autre (tout comme pour démontrer une équivalence, on doit montrer les deux implications). On déduit du théorème 1 les propriétés suivantes des opérations ensemblistes. Les démonstrations constituent un bon exercice de traduction, que nous laissons au lecteur. Nous conseillons aussi de remplacer $ A$ par $ \{n\in \mathbb{N} ;\;n\leqslant 6\}$, $ B$ par $ \{n\in \mathbb{N} ;\;2 \vert n\}$ et $ C$ par $ \{n\in \mathbb{N} ;\;3 \vert n\}$ et d'écrire en extension tous les ensembles du théorème.

Théorème 2   Soient $ A$, $ B$ et $ C$ trois ensembles. Les égalités ensemblistes suivantes sont toujours vraies.
$ \bullet$
Commutativité :

$\displaystyle \Big(A\cap B\Big) = \Big(B\cap A \Big)\;.$ (13)

$\displaystyle \Big(A\cup B \Big) = \Big(B\cup A\Big)\;.$ (14)

$ \bullet$
Associativité :

$\displaystyle \Big(A\cap (B\cap C)\Big) = \Big((A\cap B) \cap C \Big)\;.$ (15)

$\displaystyle \Big(A\cup (B\cup C)\Big) = \Big((A\cup B) \cup C \Big)\;.$ (16)

$ \bullet$
Distributivité :

$\displaystyle \Big(A\cap (B\cup C)\Big) = \Big((A\cap B)\cup(A\cap C)\Big)\;.$ (17)

$\displaystyle \Big(A\cup (B\cap C)\Big) = \Big((A\cup B)\cap(A\cup C)\Big)\;.$ (18)

$ \bullet$
Complémentaires : soient $ A$ et $ B$ des parties d'un ensemble $ E$. Alors :

$\displaystyle E\setminus(E\setminus A)=A\;,$ (19)

$\displaystyle E\setminus(A\cup B)=(E\setminus A)\cap(E\setminus B)\;,$ (20)

$\displaystyle E\setminus(A\cap B)=(E\setminus A)\cup(E\setminus B)\;.$ (21)

Nous nous placerons toujours dans le cas où tous les ensembles considérés sont des parties d'un ensemble de référence $ E$. Le complémentaire d'une partie $ A$ est alors implicitement défini comme l'ensemble des éléments de $ E$ qui n'appartiennent pas à $ A$. Moyennant cette convention, le résultat d'une opération ensembliste quelconque sur des parties de $ E$ est encore une partie de $ E$. Il est commode de visualiser $ E$ par un rectangle et les sous-ensembles de $ E$ par des «patates»  hachurées dessinées dans ce rectangle. Le résultat s'appelle un diagramme de Venn, plutôt qu'un sac de patates (figure 1). Nous conseillons au lecteur de visualiser les égalités ensemblistes du théorème 2 sur des diagrammes de Venn.
Figure 1: Diagrammes de Venn pour le complémentaire, l'intersection et la réunion.
\includegraphics[width=5cm, height=4cm]{Venna} \includegraphics[width=5cm, height=4cm]{Vennb} \includegraphics[width=5cm, height=4cm]{Vennc}

Il existe d'autres manières utiles de combiner des ensembles entre eux pour en former de nouveaux. Nous utiliserons plusieurs fois le produit cartésien.

Définition 2   Soient $ A$ et $ B$ deux ensembles. On appelle produit cartésien de $ A$ par $ B$ et on note $ A\times B$ l'ensemble des couples formés d'un élément de $ A$ et un de $ B$.

$\displaystyle A\times B = \{ (a,b) \;;\quad a\in A$    et $\displaystyle b\in B \}\;.
$

Le produit cartésien de $ A$ par lui-même se note $ A^2$. On le généralise à plus de deux copies de $ A$ en définissant $ A^n$ comme l'ensemble des $ n$-uplets formés d'éléments de $ A$.

$\displaystyle A^n = \{ (a_1,\ldots,a_n) ,\;(a_1\in A)\wedge\ldots\wedge(a_n\in A) \}\;.
$

Attention, dans un $ n$-uplet, certaines coordonnées peuvent être identiques et l'ordre est important. Par exemple, si $ a$ et $ b$ sont deux éléments distincts de $ A$, les triplets $ (a,b,a)$ et $ (a,a,b)$ sont des éléments distincts de $ A^3$.

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