Théorème de Cauchy-Lipschitz

Nous présentons ici la version la plus simple d'un théorème général d'existence et d'unicité des solutions d'une équation différentielle.

Toute équation différentielle peut se ramener à une équation d'ordre $ 1$, homogène en temps, quitte à accepter une augmentation de la dimension. De plus pour une telle équation, on peut toujours ramener l'origine du temps en 0. Il est donc naturel de considérer le problème différentiel avec condition initiale suivant, dit «problème de Cauchy» :

$\displaystyle \left\{ \begin{array}{lcl} Y'(t) &=& G(Y(t)) Y(0) &=& y_0\;. \end{array} \right.$ (10)

Dans ce problème, la fonction $ G$ est une fonction de $ \mathbb{R}^d$ dans $ \mathbb{R}^d$, la condition initiale $ y_0$ est un point de $ \mathbb{R}^d$. Une solution au problème (10) est une fonction dérivable $ Y$ de $ \mathbb{R}^+$ dans $ \mathbb{R}^d$, vérifiant (10) pour tout $ t>0$.

Théorème 7   Supposons que la fonction $ G$ soit continûment différentiable, et que ses dérivées partielles soient bornées par une constante $ M$ :

$\displaystyle \forall i,j=1,\ldots,d ,\;\forall y\in \mathbb{R}^d ,\quad
\left\vert \frac{\partial G_i}{\partial y_j}(y) \right\vert \leqslant M\;.
$

Alors il existe une solution unique au problème de Cauchy (10), définie sur $ [0,+\infty[ $.

Démonstration : Au niveau de ce cours, nous ne pouvons pas faire mieux que donner un bref aperçu des idées qui permettent de démontrer ce résultat.

Pour montrer que le problème de Cauchy (10) admet une solution unique définie sur tout $ \mathbb{R}^+$, il suffit de montrer que pour tout $ T>0$, il admet une solution unique définie sur $ [0,T]$. Considérons l'espace des fonctions continues de $ [0,T]$ dans $ \mathbb{R}^d$, $ {\cal C}([0,T])$. C'est un espace vectoriel normé complet (espace de Banach). Définissons dans cet espace l'opérateur $ \Phi$ qui à une fonction continue $ z$ associe la fonction $ \Phi(z)$ définie par :

$\displaystyle \forall t\in [0,T]\;,\quad \Phi(z)(t) = y_0 +
\int_{0}^t G(z(s)) \mathrm{d}s\;.
$

Observons que $ Y$ est solution du problème de Cauchy (10) sur $ [0,T]$ si et seulement si $ \Phi(Y)=Y$. Nous cherchons donc un point fixe de l'opérateur $ \Phi$ dans $ {\cal C}([0,T])$. La démonstration consiste à prouver que si $ Y_0$ est une fonction quelconque, alors la suite des itérés successifs

$\displaystyle Y_0 ,\;\Phi(Y_0) ,\;\Phi(\Phi(Y_0)) ,\ldots,\;\Phi^{\circ n}(Y_0)
 ,\ldots
$

converge vers la solution désirée. On utilise pour cela le théorème du point fixe.

$ \square$ On pourrait penser au vu de ce qui précède que calculer la suite des itérés $ \Phi^{\circ n}(Y_0)$ constitue une méthode de calcul approché de la solution $ Y$. Malheureusement, le calcul de $ \Phi^{\circ n}(Y_0)$ implique le calcul de $ n$ intégrales successives, entraînant des erreurs d'approximations qui se cumulent. Cette méthode n'est donc pas utilisée en pratique.

Exemple : Explicitons le calcul des itérés $ \Phi^{\circ n}(Y_0)$ dans un cas particulier :

\begin{displaymath}
\left\{
\begin{array}{lcl}
y'(t)&=&ay(t)\\
y(0)&=&y_0\;.
\end{array}\right.
\end{displaymath}

L'opérateur $ \Phi$ s'écrit :

$\displaystyle \Phi(z)(t) = y_0+\int_{0}^t a z(s) \mathrm{d}s\;.
$

Pour $ z(t)\equiv y_0$, on obtient $ \Phi(z)(t)=y_0+tay_0$, et par récurrence :

$\displaystyle \Phi^{\circ n}(z)(t) = \Big(1+ ta + \frac{t^2}{2}a^2+\cdots+\frac{t^n}{n!}a^n
\Big)y_0\;,
$

qui converge bien vers la solution $ \mathrm{e}^{a t}y_0$.

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