Continuité

Nous étudions dans ce chapitre des techniques de calcul pour des fonctions définies sur un domaine $ D$ de $ \mathbb{R}^n$, donc dépendant de $ n$ variables réelles, et à valeurs dans $ \mathbb{R}^{m}$. Nous nous limiterons souvent aux dimensions $ 2$ et $ 3$, la généralisation aux dimensions supérieures ne posant pas de problème particulier. Voici quelques exemples simples. Surface d'un rectangle en fonction de sa longueur et sa largeur :

\begin{displaymath}
\begin{array}{rcl}
\mathbb{R}^2&\longrightarrow &\mathbb{R}\\
(x,y)&\longmapsto&xy\;.
\end{array}\end{displaymath}

Surface d'un parallélépipède en fonction de ses trois dimensions :

\begin{displaymath}
\begin{array}{rcl}
\mathbb{R}^3&\longrightarrow &\mathbb{R}\\
(x,y,z)&\longmapsto&2(xy+yz+xz)\;.
\end{array}\end{displaymath}

Surface et volume d'un parallélépipède en fonction de ses trois dimensions :

\begin{displaymath}
\begin{array}{rcl}
\mathbb{R}^3&\longrightarrow &\mathbb{R}^...
...x,y,z)&\longmapsto&\Big(2(xy+yz+xz) , xyz\Big)\;.
\end{array}\end{displaymath}

Coordonnées polaires d'un point du plan (figure 1) :

\begin{displaymath}
\begin{array}{rcl}
\mathbb{R}^+\times [0,2\pi[&\longrightarr...
...apsto&(x,y)\\
&&x=r\cos\theta ,\;y=r\sin\theta\;.
\end{array}\end{displaymath}

Figure 1: Coordonnées polaires d'un point du plan.
\includegraphics[width=6cm]{coordpolaires}
Coordonnées cylindriques d'un point de l'espace (figure 2) :

\begin{displaymath}
\begin{array}{rcl}
\mathbb{R}^+\times [0,2\pi[\times \mathbb...
...sto&(x,y,z)\\
&&x=r\cos\theta ,\;y=r\sin\theta\;.
\end{array}\end{displaymath}

Figure 2: Coordonnées cylindriques d'un point de l'espace.
\includegraphics[width=5cm]{coordcylindriques}
Coordonnées sphériques d'un point de l'espace (figure 3) :

\begin{displaymath}
\begin{array}{rcl}
\mathbb{R}^+\times [0,2\pi[\times [-\frac...
...phi ,\;y=r\sin\theta\sin\phi
 ,\;z=r\cos\theta\;.
\end{array}\end{displaymath}

Figure 3: Coordonnées sphériques d'un point de l'espace.
\includegraphics[width=6cm]{coordspheriques}
Représenter graphiquement une fonction de plusieurs variables n'est possible que pour les fonctions de $ \mathbb{R}^2$ dans $ \mathbb{R}$. La fonction $ f : (x,y)\mapsto f(x,y)$ est représentée en dimension $ 3$ par la surface d'équation $ z=f(x,y)$. La figure 4 montre une représentation de la surface d'équation $ z=\sin(xy)$.
Figure: Surface d'équation $ z=\sin(xy)$.
\includegraphics[width=8cm]{sinxy}
Pour ne pas compliquer les notations dans les définitions qui viennent, nous prendrons l'exemple d'une application de $ \mathbb{R}^3$ dans $ \mathbb{R}^2$ :

\begin{displaymath}
\begin{array}{rcl}
\mathbb{R}^3
&\longrightarrow &\mathbb{R}^2\\
(x,y,z)&\longmapsto&(f(x,y,z),g(x,y,z))\;.
\end{array}\end{displaymath}

Les applications $ f$ et $ g$, de $ \mathbb{R}^3$ dans $ \mathbb{R}$, sont les applications coordonnées. Si on fixe un point $ (a,b,c)$ dans l'espace de départ, on définit 3 applications partielles pour chaque application coordonnée.

\begin{displaymath}
\begin{array}{lclclcl}
x&\longmapsto&f(x,b,c)&,&x&\longmapst...
...\\
z&\longmapsto&f(a,b,z)&,&z&\longmapsto&g(a,b,z)
\end{array}\end{displaymath}

Avant de pouvoir parler de continuité et de dérivabilité, nous devons définir la notion de limite dans l'espace $ \mathbb{R}^n$.

Définition 1   On dit qu'une suite de points converge dans $ \mathbb{R}^n$ vers un point $ \mathbf{x}$ si pour tout $ i$, la suite des $ i$-ièmes coordonnées converge dans $ \mathbb{R}$ vers la $ i$-ième coordonnée de $ \mathbf{x}$.

Dans $ \mathbb{R}^3$, la suite $ ((x_n,y_n,z_n))_{n\in\mathbb{N}}$ converge si et seulement si les trois suites $ (x_n)_{n\in\mathbb{N}}$, $ (y_n)_{n\in\mathbb{N}}$, $ (z_n)_{n\in\mathbb{N}}$ convergent dans $ \mathbb{R}$. Par exemple, la suite $ (2^{-n},2^{1/n},2+1/n)$ converge dans $ \mathbb{R}^3$ vers $ (0,1,2)$.

Définition 2   On dit qu'une application $ \Phi$ de $ \mathbb{R}^n$ dans $ \mathbb{R}^m$ est continue en un point $ \mathbf{x}$ de $ \mathbb{R}^n$ si l'image par $ \Phi$ de toute suite de points de $ \mathbb{R}^n$ qui converge vers $ \mathbf{x}$, converge vers $ \Phi(\mathbf{x})$ dans $ \mathbb{R}^m$.

Comme cas particulier, l'application qui à $ (x_1,\ldots,x_n)$ associe la coordonnée $ x_i$ est continue. D'après la définition de la convergence, l'application $ \Phi$ est continue si et seulement si ses applications coordonnées le sont. Il suffit donc d'examiner la continuité des applications de $ \mathbb{R}^n$ dans $ \mathbb{R}$.

Si $ \Phi$ est continue, alors ses applications partielles le sont aussi. Malheureusement, il peut se faire que les applications partielles soient continues sans que l'application $ \Phi$ le soit. Nous n'aborderons pas ce cas pathologique. Toutes les applications que nous rencontrerons seront continues sur leur domaine de définition. Pour le vérifier, il suffira en général d'invoquer le théorème suivant.

Théorème 1    
  1. La somme et le produit de deux applications continues de $ \mathbb{R}^n$ dans $ \mathbb{R}$ sont continues.
  2. La composée d'une application continue de $ \mathbb{R}^n$ dans $ \mathbb{R}$ par une application continue de $ \mathbb{R}$ dans $ \mathbb{R}$ est continue.

Comme premier exemple, considérons $ n$ applications continues de $ \mathbb{R}$ dans $ \mathbb{R}$, $ f_1,\ldots,f_n$. Pour tout $ i=1,\ldots,n$, l'application $ (x_1,\ldots, x_n)\mapsto f_i(x_i)$ est continue de $ \mathbb{R}^n$ dans $ \mathbb{R}$, comme composée de $ f_i$ et de la $ i$-ième application coordonnée.
Leur somme $ (x_1,\ldots, x_n)\mapsto f_1(x_1)+\cdots
+f_n(x_n)$ et leur produit $ (x_1,\ldots, x_n)\mapsto f_1(x_1)\cdots
f_n(x_n)$ sont aussi continues.

Vérifions maintenant que l'application suivante est continue en tout point de $ \mathbb{R}^3$

$\displaystyle (x,y,z)\longmapsto \left(\frac{\exp(xy)\sin(z+\ln(1+y^2))}{1+x^2+y^2}\;,\;
\sqrt{\frac{2\cos^2(x+y)}{1+z^4}}\right)\;.
$

Il suffit de montrer que les deux applications coordonnées sont continues. L'application qui à $ (x,y,z)$ associe $ xy$ est continue comme produit de deux applications coordonnées (point 1). Sa composée par $ \exp$ l'est d'après le point 2. L'application qui à $ (x,y,z)$ associe $ z+\ln(1+y^2)$ est continue d'après le point 1 et la composée par $ \sin$ l'est d'après 2. L'application qui à $ (x,y,z)$ associe $ 1+x^2+y^2$ est continue d'après 1, l'inverse d'après 2 (car le dénominateur ne s'annule pas). Finalement le produit de trois applications continues est continu d'après 1. On procède de même pour l'autre application coordonnée.

         © UJF Grenoble, 2011                              Mentions légales